Alors que la menace des grandes épidémies s’est réaffirmée avec la COVID-19, les scientifiques sont en alerte maximale face à la prochaine crise sanitaire, potentiellement désignée sous le nom de “Maladie X”. Une enquête au cœur de l’Institut Pasteur révèle les fronts sur lesquels se prépare la bataille contre les pathogènes de demain.
Le risque infectieux global ne cesse d’augmenter, martèlent les experts. Depuis le début du siècle, le monde subit en moyenne une pandémie tous les quatre ans. Cette accélération trouve ses racines dans des facteurs multiples et interconnectés qui préoccupent profondément la communauté scientifique internationale.
Le réchauffement climatique et la globalisation des échanges favorisent l’expansion de vecteurs comme le moustique tigre. Présent désormais dans 81 départements français, il est responsable de la transmission autochtone de maladies tropicales, avec plus de 400 cas de chikungunya recensés en métropole depuis janvier 2025.
Les zoonoses, ces maladies transmises par les animaux, représentent 60% des maladies émergentes des cinquante dernières années. Parallèlement, la recrudescence de certaines pathologies, comme la coqueluche avec 150 000 cas en France en 2024, alerte sur l’érosion de l’immunité collective due à une baisse de la couverture vaccinale.

Face à cette menace polymorphe, l’Institut Pasteur maintient une veille permanente. Ses équipes collaborent avec un réseau mondial de surveillance. La Cellule d’Intervention Biologique d’Urgence (CIBU) peut être déployée en moins de 48 heures sur n’importe quel foyer épidémique dans le monde.
“Une alerte est déclenchée lorsque nous recevons des signaux indiquant un risque pour la santé publique”, explique Laurent de la CIBU. Ces signaux proviennent de réseaux locaux à internationaux, dont l’Organisation mondiale de la Santé. La cellule a été en première ligne lors des premiers clusters de COVID-19 en Italie.
L’innovation technologique devient un atout crucial. Les chercheurs misent sur l’intelligence artificielle pour analyser des millions de données et améliorer les prévisions en début d’épidémie, lorsque les informations sont encore parcellaires. “Cela pourrait nous permettre de mieux anticiper dans des situations d’incertitude”, précise Juliette, ingénieure.

Les Centres Nationaux de Référence (CNR) de l’Institut traquent l’évolution de virus connus mais changeants, comme celui de la grippe, ou surveillent des bactéries redoutables telles que les méningocoques, responsables de formes graves de méningite avec un taux de mortalité de 10%.
La vaccination reste l’outil de prévention le plus puissant, ayant sauvé environ 154 millions de vies en 50 ans. Pourtant, son relâchement constitue un danger immédiat. “Pour des maladies très contagieuses comme la rougeole, il faut une couverture vaccinale d’au moins 95%”, rappelle un chercheur.
L’Institut, qui fonctionne largement grâce à la générosité publique via l’opération Pasteurdon, poursuit ses travaux fondamentaux sur de nouveaux vaccins contre le VIH ou certains cancers. La course contre la montre est engagée pour comprendre, prévenir et contenir la prochaine grande épidémie avant qu’elle ne frappe.