L’homme qui aurait utilisé la “magie” pour détourner 242 millions de dollars à Dubaï 🧿💰 L’affaire a d’abord été prise pour une rumeur tant le scénario semblait irréaliste : aucune effraction, aucune trace numérique évidente, et pourtant des centaines de millions de dollars disparus.

Un Malien a orchestré l’une des plus audacieuses escroqueries bancaires de l’histoire, soutirant près d’un quart de milliard de dollars à la Dubai Islamic Bank entre 1995 et 1998. L’affaire, mêlant prétendue sorcellerie, corruption et failles systémiques, vient d’être reconstituée grâce à des documents judiciaires et des témoignages exclusifs.

Foutanga Babani Sissoko, présenté comme un sorcier, a convaincu le directeur de la banque, Mohamed Ayou, de lui confier des fonds colossaux en promettant de les doubler par des pouvoirs surnaturels. Le stratagème a fonctionné pendant des années, vidant les coffres de l’institution sans éveiller les soupçons.

La machination a débuté par une démonstration théâtrale dans une pièce obscure de Dubaï. Sissoko, après une mise en scène de rituel, aurait transformé 100 000 dirhams en 200 000 devant les yeux médusés du banquier. Cette illusion fut le déclic qui a scellé la confiance absolue de la victime.

Convaincu des pouvoirs de Sissoko, Mohamed Ayou a ouvert un compte spécial et initié 183 virements internationaux pour un total de 242 millions de dollars. Les fonds ont transité vers des comptes aux États-Unis, en France, en Suisse et ailleurs, sans aucun retour sur investissement.

Pendant ce temps, Sissoko menait grand train. Il a épousé une employée de Citibank à New York pour faciliter les transferts, lui offrant 500 000 dollars en cadeau de mariage. Il a dépensé des fortunes en bijoux, voitures de luxe, jets privés et a même fondé une compagnie aérienne éphémère, DABIA Air.

L’empire a commencé à s’effondrer en 1996 lorsqu’une tentative de corruption visant à acheter des hélicoptères militaires aux États-Unis a échoué. Arrêté en Suisse puis extradé à Miami, Sissoko a surpris tout le monde en payant une caution record de 20 millions de dollars en espèces.

Son procès pour corruption mineure a été un coup de théâtre. Il a plaidé coupable, évitant ainsi que l’enquête ne se penche sur l’origine réelle de sa fortune. Il a écopé de 43 jours de prison et d’une amende, avant de finir sa peine en résidence surveillée au Mali après un « don » d’un million de dollars.

À Dubaï, la découverte des virements frauduleux en 1998 a provoqué une panique bancaire. Le gouvernement a dû intervenir en urgence, garantissant les dépôts et prenant le contrôle d’une partie de la banque. Mohamed Ayou et deux complices ont été condamnés à trois ans de prison.

Sissoko, lui, est resté intouchable au Mali, pays sans accord d’extradition avec les Émirats. Élu député en 2002, il a bénéficié de l’immunité parlementaire. Dans une rare interview en 2018, il a admis avoir dilapidé toute sa fortune, estimée à 400 millions de dollars à son apogée.

Interrogé sur l’arnaque et les allégations de sorcellerie, il a rétorqué avec ironie : « Si j’étais vraiment sorcier, pourquoi aurais-je besoin de voler une banque ? Il est décédé libre dans son village natal en 2021, laissant derrière lui une légende de supercherie financière.

Cette affaire met en lumière des failles béantes dans les contrôles bancaires de l’époque et la vulnérabilité psychologique face à des manipulations sophistiquées. La Dubai Islamic Bank a intenté un procès contre Citibank, l’accusant de négligence, mais n’a jamais récupéré les fonds disparus.

L’héritage de cette escroquerie demeure un cas d’école sur les dangers de la cupidité et les limites des systèmes de sécurité financiers, rappelant qu’aucune institution, aussi puissante soit-elle, n’est à l’abri d’un manipulateur de talent.